C'est à Bourges
que Déodat Dieudonné (par
abréviation : Dié) naquit, vers le milieu du
Ve siècle. Il y fut élevé et lorsque, adolescent, il décida de sa vocation
religieuse, il s'en fut trouver le fondateur du monastère de Chabris-sur-Cher.
C'est là qu'il fit la connaissance d'un diacre du nom de Baudemir ou Baumaire.
S'étant liés d'amitié, peut-être offensés dans leur esprit d'indépendance par
la rude discipline monastique, ou bien également épris d'isolement et de
silence, ces religieux décidèrent, une belle nuit, de quitter leur couvent.
Baumaire avait appris à Déodat qu'il y avait sur les bords de la Loire, en pays
Blésois, un lieu pouvant convenir au genre de vie qu'ils voulaient mener.
Comme toute cette
foule d'ermites qui, avant et après cette époque, s'installèrent de leur chef
jusque dans les moindres recoins de la Gaule païenne et y fondèrent les
localités qui portent encore leur nom, ils partirent vers leur destin. N'emportant
que leur cilice, leur coule, leur manteau et un bâton, ils parcoururent, dit la
légende, tout le trajet en cette même nuit soit treize lieues (60.000 pas,
est-il écrit).
Arrivés sur les
bords de la Loire, les compagnons se séparèrent. Baumaire s'isola, paraît-il, dans une des îles de la Loire face au bourg de
Saint-Dyé peut-être même dans celle appelée depuis l'île de Saint-Dyé.
Déodat bâtit sa cabane dans le voisinage du hameau de l'Ecuelle, lieu
d'épines et de broussailles. En effet, le coteau sur lequel fut construite la
ville de Saint-Dyé était à cette époque, couvert par le prolongement de la
forêt de Boulogne. Ce que nous désignons aujourd'hui sous le nom de l'écuelle
était en lisière, mais encombré de ronces.
L’arrivée de cet ermite pour prêcher la bonne parole avait quelque
chose d’un peu avant-gardiste en pleine période païenne.
Il y avait, entre
autres croyances remontant jusqu'à l'âge
néolithique, ce culte des eaux, des arbres et des pierres, de
toutes les forces mystérieuses de la nature qui semblaient
témoigner de la présence d'une divinité. Les paysans d'alors, qui ne demandaient qu'à rester païens (si bien que le mot « paganus » qui les désignaient, signifiait à la fois païen et paysan), croyaient obtenir de ces forces, la guérison de leurs maladies et la fécondité de leurs champs.
Le paganisme, appuyé par l'influence des prêtres païens qui desservaient le temple d'Appolon de Suèvres situé en face sur l'autre rive de la Loire, résistait encore
opiniâtrement au christianisme naissant.
Le culte des
sources notamment, fut une des religions de la Gaule
entière et, pour les populations, l'eau avait toujours un
caractère sacré. Selon la volonté des évêques gallo-romains, il
fallait que les sanctuaires voués aux faux dieux soient consacrés au culte véritable, pour que les païens convertis l'adorent dans les lieux mêmes où ils avaient
l'habitude de venir.
Ce fut la grotte
où se pratiquait ce culte des eaux qui devint le refuge
de Déodat où, ermite, il mena une vie spirituelle dans la
solitude et le recueillement. Il prit possession de cette source païenne, au profit
de l'église chrétienne. La légende du
Dragon qui, dit-on, hantait cette grotte et que l'ermite terrassa,
n'est que le symbole de l'idolâtrie vaincu par la prière, le triomphe du christianisme.
Déodat n'était que diacre. Il ne voulut jamais être
élevé à la dignité de la prêtrise.
Clovis engagé auprès
de Déodat à se faire chrétien, si comme
l'ermite le lui avait promis il remportait la victoire, chasser les
Bretons qui ravageaient le Val entre Orléans et Tours. Clovis voulut
prouver sa reconnaissance à Déodat, en lui concédant le vaste territoire qui environnait sa caverne plus 26 livres d'or et autant d'argent, ce qui ferait
aujourd'hui, au poids de l'or et de
l'argent, une coquette fortune.
Ceci aida bien les
choses, car Déodat ayant réussi à grouper autour de lui une
quarantaine de disciples, avec l'argent de la donation, put,
non seulement venir en aide aux pauvres qui ne manquaient pas,
mais construire un modeste couvent auprès de la grotte où il
vivait, dans la méditation et la prière.
A son décès à un âge avancé vers 530, ses disciples
l'ensevelirent dans la grotte où il avait vécu, proche de l’église actuelle. La chapelle édifiée
au-dessus de sa sépulture, détruite par les Normands puis reconstruite, devint
un lieu de pèlerinage.
L'ancien compagnon de Dié s'était retiré dans une des îles
de la Loire peut-être même dans celle appelée depuis l'île de Saint-Dyé. Il y était mort, et son corps dut y reposer jusqu'à son transfert dans l'église de Saint-Dyé, probablement au IXe siècle.
On sait qu'en
Gaule, la dépouille des saints était souvent enfouie sous terre.
Beaucoup plus tard, lorsqu'une église avait pu être construite à proximité, le sarcophage exhumé fut transporté dans un hypogée maçonné, tombe
creusée dans le sol avec chambre funéraire
voûtée, mais qui n'apparaissait pas au-dessus du niveau du
sanctuaire.
Ce n’est qu’en 1963 qu’on
trouva son sarcophage en grès rose d’Anjou sous le dallage de l’église lors de
fouilles archéologiques dont le but n’était pas celui-ci. Il était complètement
enfoui, on l’a dégagé et aujourd’hui il est désormais visible dans l’église sous
un plancher de verre.